La Prix Goncourt 2016 poursuit son entreprise de dévoilement des logiques de domination dans une saga familiale. « Le Pays des autres », premier tome de la trilogie qui paraît ce 5 mars, est une réussite.
En 1955, Selma est jeune, ravissante, elle se veut libre et, dans les cafés de Meknès, ce personnage secondaire du Pays des autres imite la Vivien Leigh d’Autant en emporte le vent (1939), qui secoue la tête en pestant : « La guerre, la guerre, la guerre, taratata ! » – la scène du film de Victor Flemming, lors de laquelle Scarlett O’Hara se plaint que les hommes, tout à leurs rodomontades bellicistes, « ne pensent jamais aux choses sérieuses », se situe peu avant qu’éclate le conflit entre Nord et Sud (1861-1865). Selma, elle, minaude, s’amuse et rêve d’amour tandis que des compatriotes, dont son frère, luttent pour l’indépendance du Maroc. Celle-ci sera déclarée un an plus tard. A ce moment-là, l’adolescente aura, elle, été forcée d’abdiquer toute aspiration à la liberté.
La guerre, la guerre, la guerre est le sous-titre que Leïla Slimani a donné à la première partie d’au Pays des autres, une trilogie sur le Maroc, où l’écrivaine est née en 1981. Et ce clin d’œil au film adapté du fameux roman de Margaret Mitchell (1936) indique assez la veine dans laquelle l’auteure inscrit son troisième roman : l’ample saga adossée à l’histoire, dont les fracas malmènent les personnages autant qu’ils les poussent à se révéler. Le choix peut surprendre après les deux premiers ouvrages de l’écrivaine, Dans le jardin de l’ogre (Gallimard, 2014) et Chanson douce (Gallimard, prix Goncourt 2016), écrits au plus sec, qui lui ont donné une place sur la scène littéraire nationale (et même internationale) pour laquelle le terme « phénomène » a des airs d’amusante litote.
La bonne nouvelle est donc que ce succès, plutôt que de l’inciter à se répéter, semble avoir autorisé Leïla Slimani à aller voir ailleurs que dans la bourgeoisie parisienne où étaient situés ses deux premiers romans. A voir plus grand, aussi, et à déployer son écriture – qui ne s’imposait pas forcément comme la qualité première de ses efficaces romans précédents. Sans pour autant dévier de la mission qu’elle paraît s’être fixée comme romancière..
« Le Pays des autres. Première partie : La guerre, la guerre, la guerre », de Leïla Slimani, Gallimard, 368 p., 20 €.
En 1955, Selma est jeune, ravissante, elle se veut libre et, dans les cafés de Meknès, ce personnage secondaire du Pays des autres imite la Vivien Leigh d’Autant en emporte le vent (1939), qui secoue la tête en pestant : « La guerre, la guerre, la guerre, taratata ! » – la scène du film de Victor Flemming, lors de laquelle Scarlett O’Hara se plaint que les hommes, tout à leurs rodomontades bellicistes, « ne pensent jamais aux choses sérieuses », se situe peu avant qu’éclate le conflit entre Nord et Sud (1861-1865). Selma, elle, minaude, s’amuse et rêve d’amour tandis que des compatriotes, dont son frère, luttent pour l’indépendance du Maroc. Celle-ci sera déclarée un an plus tard. A ce moment-là, l’adolescente aura, elle, été forcée d’abdiquer toute aspiration à la liberté.
La guerre, la guerre, la guerre est le sous-titre que Leïla Slimani a donné à la première partie d’au Pays des autres, une trilogie sur le Maroc, où l’écrivaine est née en 1981. Et ce clin d’œil au film adapté du fameux roman de Margaret Mitchell (1936) indique assez la veine dans laquelle l’auteure inscrit son troisième roman : l’ample saga adossée à l’histoire, dont les fracas malmènent les personnages autant qu’ils les poussent à se révéler. Le choix peut surprendre après les deux premiers ouvrages de l’écrivaine, Dans le jardin de l’ogre (Gallimard, 2014) et Chanson douce (Gallimard, prix Goncourt 2016), écrits au plus sec, qui lui ont donné une place sur la scène littéraire nationale (et même internationale) pour laquelle le terme « phénomène » a des airs d’amusante litote.
La bonne nouvelle est donc que ce succès, plutôt que de l’inciter à se répéter, semble avoir autorisé Leïla Slimani à aller voir ailleurs que dans la bourgeoisie parisienne où étaient situés ses deux premiers romans. A voir plus grand, aussi, et à déployer son écriture – qui ne s’imposait pas forcément comme la qualité première de ses efficaces romans précédents. Sans pour autant dévier de la mission qu’elle paraît s’être fixée comme romancière..
« Le Pays des autres. Première partie : La guerre, la guerre, la guerre », de Leïla Slimani, Gallimard, 368 p., 20 €.
Par Raphaëlle Leyris - lemonde.fr
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