Moment politique inédit avec l'élection d'un nouveau président à la tête de l'Assemblée populaire nationale. Problème : Saïd Bouhadja, l'ex-président, refuse de reconnaître ce fait accompli au profit de Mouad Bouchareb. L'opposition dénonce un « coup d'État ».
Sit-in de dépités pour empêcher le président du Parlement d'accéder à son bureau, changement des serrures de ce dernier, retrait de ses gardes du corps : tout a été fait par les députés contestataires pour faire tomber le président de l'Assemblée populaire nationale (APN, chambre basse du Parlement algérien). Mercredi, c'est le coup de grâce. Une séance plénière élit le très peu connu Mouad Bouchareb, 47 ans, député du Front de libération national de Sétif, président du groupe parlementaire FLN et candidat unique, à la tête de l'Assemblée… alors que « l'autre » président, Bouhadja, refuse de reconnaître ce fait accompli.
Sit-in de dépités pour empêcher le président du Parlement d'accéder à son bureau, changement des serrures de ce dernier, retrait de ses gardes du corps : tout a été fait par les députés contestataires pour faire tomber le président de l'Assemblée populaire nationale (APN, chambre basse du Parlement algérien). Mercredi, c'est le coup de grâce. Une séance plénière élit le très peu connu Mouad Bouchareb, 47 ans, député du Front de libération national de Sétif, président du groupe parlementaire FLN et candidat unique, à la tête de l'Assemblée… alors que « l'autre » président, Bouhadja, refuse de reconnaître ce fait accompli.
Un fait inédit
L'Algérie se retrouve donc avec un Parlement et deux présidents. Fait inédit. Les partis de la majorité pro-gouvernementale (FLN, RND, TAJ, MPA) se félicitent de l'issue de ce coup de force qui a duré quelque trois semaines. De son côté, l'opposition a préféré ne pas assister à la plénière d'hier 24 octobre. « Sur instruction de l'exécutif, des députés agissant en usurpation de la qualité de bureau de l'APN ont convoqué une séance plénière en violation de l'article 55 du règlement intérieur de l'Assemblée nationale pour valider un coup d'État contre l'institution législative », a par exemple réagi le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD, laïque). Ce parti de l'opposition va plus loin : « Avec ce coup de force encadré par des agents de la police politique et des renseignements généraux au vu et au su de tous, l'Algérie vient de rejoindre le cercle très fermé des régimes absolutistes. » « Le président de l'APN n'est pas légitime, car élu dans le cadre de procédures illégales et anticonstitutionnelles », a, pour sa part, écrit sur sa page Facebook le président du Mouvement pour la société de la paix (MSP, Frères musulmans), Abderrezak Makri.
Ce qui s'est passé
Durant trois semaines, leaders des partis pro-pouvoir et leurs troupes dans le Parlement ont mené une véritable guerre contre le président du Parlement Saïd Bouhadja, FLNiste et réputé fidèle au chef de l'État, Abdelaziz Bouteflika. Pourquoi cet acharnement qui s'est conclu sur ce que l'opposition qualifie de « coup d'État » au Parlement ? Beaucoup de théories circulent autour de cette étrange crise. « Une bagarre interne au FLN, liée surtout aux avantages matériels et financiers et aux réseaux de favoritisme qui se sont beaucoup développés au sein de l'APN », assure une source du vieux parti. La crise, tient-il à rappeler, a bien démarré le 24 septembre dernier, au lendemain du limogeage, par Bouhadja, du Bachir Slimani, l'influent secrétaire général de l'APN. Les deux hommes s'échangent des accusations et des insinuations de mauvaise gestion. « L'APN est devenue une vache à lait pour tout ce beau monde, certains députés ou fonctionnaires de l'institution en vivaient comme d'une rente à vie », regrette une cadre FLN. « J'ai trouvé des députés qui avaient pris cinq véhicules, d'autres trois, etc. J'ai mis un terme à cette anarchie, comme j'ai aussi interdit les recrutements après avoir trouvé un surplus d'une centaine d'employés, avait déclaré à la presse Bouhadja. Lorsque j'ai mis fin aux fonctions du secrétaire général, à la demande de la présidence, j'ai rédigé un rapport dans lequel j'ai tout expliqué en apportant tous les arguments qui justifient les actes de ma gestion. »
Silence du côté de Zéralda
Est-ce pour cette raison que ce même ex-secrétaire général Bachir Slimani a été, hier, le premier à féliciter le « nouveau président » du Parlement Mouad Bouchareb, comme le rapporte ce matin El Watan ? Sa probable réintégration à ce poste stratégique (qui contrôle tous les moyens financiers et les recrutements à l'APN) nous éclairera. Pendant ce temps, silence radio du côté de Zéralda, la résidence médicalisée du président Bouteflika. Même si Mouad Bouchareb a tenu à citer onze fois le chef de l'État dans son discours d'investiture, rien ne semble émaner de la présidence de la République durant ces trois folles semaines de crise. Dans le quotidien Liberté de ce matin, le secrétaire général de l'Alliance nationale républicaine (ANR), Belkacem Sahli, dont le parti a boycotté la séance élective d'hier, déclare : « Si, réellement, le président était intervenu, la crise ne durerait pas tout ce temps. » « Ce silence présidentiel porte un message très clair : Zéralda ne veut pas s'immiscer dans un conflit touchant le Parlement au nom du principe de la séparation des pouvoirs », confie une source gouvernementale. Certains députés de l'opposition prédisent pour leur part une dissolution de l'Assemblée et même une démission collective des représentants du peuple réfractaires au « coup de force » de ce mercredi. « Sinon, on attend, comme d'habitude », lâche avec un air de dépit un cadre du FLN : « Le coup de sifflet de Zéralda n'a pas encore retenti. »
PAR ADLÈNE MEDDI, À ALGER/lepoint.fr
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