Forcé de s'engager dans la lutte contre les djihadistes de l'organisation État islamique, le président turc va désormais devoir faire face à la question kurde.
Recep Tayyip Erdogan, le président turc, n'est pas homme à céder aux menaces. Le 20 juillet, un attentat-suicide tuait 32 jeunes Kurdes de Turquie et en blessait une centaine d'autres devant le centre culturel de Suruç, ville turque à la frontière syrienne. Le massacre était revendiqué par l'organisation État islamique (EI) d'al-Baghadi, le « calife » autoproclamé de Syrie. Trois jours plus tard, un sous-officier turc était tué lors d'un accrochage sur la frontière avec des djihadistes. Les chars turcs bombardaient deux QG de Daesh en Syrie, en représailles.
La veille, lors d'une conversation téléphonique avec Barack Obama, le président turc avait donné son feu vert pour que les avions américains puissent partir des bases turques bombarder l'EI en Syrie. Le président turc, dont le pays est membre de l'Otan, s'y était toujours refusé, suscitant la colère de son allié américain. Le 24 juillet à l'aube, des avions de combat F-16 turcs franchissaient, à leur tour, la frontière syrienne, et envoyaient des missiles sur des positions de l'EI.
Affaiblir les Kurdes de Syrie
Cela ressemble à un virage à 90 degrés pour Recep Tayyip Erdogan, qui refusait jusqu'alors de s'engager militairement contre l'EI. Le président turc avait toujours eu deux priorités : renverser le régime de Bachar el-Assad et affaiblir les Kurdes de Syrie. « Nous ne permettrons jamais la formation d'un nouvel État à notre frontière sud », affirmait-il le 26 juin. En clair, il n'était pas question d'accepter que les Kurdes créent dans le nord de la Syrie un fief qui deviendrait une base arrière du PKK, le Parti des travailleurs du Kurdistan, mouvement de gauche autonomiste kurde, avec lequel existe un cessez-le-feu de plus en plus branlant depuis 2013.
Aussi Recep Tayyip Erdogan a-t-il joué avec le feu. L'EI étant, en Syrie, le meilleur ennemi des Kurdes, Ankara n'entendait pas affaiblir les djihadistes qui combattaient aussi Daesh. Pire, la Turquie a laissé passer les volontaires étrangers qui rejoignaient les rangs de l'EI, a acheté son pétrole et lui a, semble-t-il, même fourni des armes, début 2014. Parallèlement, Erdogan a fermé la frontière devant les jeunes volontaires kurdes de Turquie qui voulaient se porter au secours de Kobané, la ville kurde de Syrie assiégée pendant 4 longs mois. Kobané sera finalement libérée par les Kurdes, après de terribles combats contre l'EI.
3 000 sympathisants dans des cellules dormantes de l'EI
Aussi, les Kurdes du PKK viennent-ils de se venger. Accusant les autorités d'être responsables, par leur double jeu, de l'attentat contre les jeunes Kurdes à Suruç, le PKK a assassiné, en deux endroits différents, trois policiers accusés de collaboration avec l'EI. En réponse, Ankara a entrepris, le 24 juillet à l'aube, une grande rafle (251 arrestations) dans les milieux Kurdes pro-PKK et parmi les djihadistes supposés, à travers tout le pays.
La situation risque d'être plus en plus critique pour la Turquie. Erdogan vient en effet de décider de se battre sur deux fronts. Le premier : en déclarant de fait la guerre à l'EI, la Turquie devrait s'impliquer de plus en plus dans la coalition internationale. Mais elle craint les représailles sur son sol où, selon des chiffres récents des services secrets turcs, l'EI disposerait de 3 000 sympathisants dans des cellules dormantes.
Second front : le PKK. Les négociations engagées en 2012 pour mettre fin au long conflit qui oppose Ankara au parti autonomiste, et a fait 40 000 morts depuis les années 1980, risquent d'être remises en cause. Certes, une partie non négligeable des Kurdes de Turquie, en particulier l'aile politique du PKK, qui envoie des députés au Parlement, tente de calmer le jeu. La majorité des Kurdes veut la paix. Il existe cependant une autre crainte à Ankara : que les Kurdes et les djihadistes règlent leurs comptes en Turquie même..
Recep Tayyip Erdogan, le président turc, n'est pas homme à céder aux menaces. Le 20 juillet, un attentat-suicide tuait 32 jeunes Kurdes de Turquie et en blessait une centaine d'autres devant le centre culturel de Suruç, ville turque à la frontière syrienne. Le massacre était revendiqué par l'organisation État islamique (EI) d'al-Baghadi, le « calife » autoproclamé de Syrie. Trois jours plus tard, un sous-officier turc était tué lors d'un accrochage sur la frontière avec des djihadistes. Les chars turcs bombardaient deux QG de Daesh en Syrie, en représailles.
La veille, lors d'une conversation téléphonique avec Barack Obama, le président turc avait donné son feu vert pour que les avions américains puissent partir des bases turques bombarder l'EI en Syrie. Le président turc, dont le pays est membre de l'Otan, s'y était toujours refusé, suscitant la colère de son allié américain. Le 24 juillet à l'aube, des avions de combat F-16 turcs franchissaient, à leur tour, la frontière syrienne, et envoyaient des missiles sur des positions de l'EI.
Affaiblir les Kurdes de Syrie
Cela ressemble à un virage à 90 degrés pour Recep Tayyip Erdogan, qui refusait jusqu'alors de s'engager militairement contre l'EI. Le président turc avait toujours eu deux priorités : renverser le régime de Bachar el-Assad et affaiblir les Kurdes de Syrie. « Nous ne permettrons jamais la formation d'un nouvel État à notre frontière sud », affirmait-il le 26 juin. En clair, il n'était pas question d'accepter que les Kurdes créent dans le nord de la Syrie un fief qui deviendrait une base arrière du PKK, le Parti des travailleurs du Kurdistan, mouvement de gauche autonomiste kurde, avec lequel existe un cessez-le-feu de plus en plus branlant depuis 2013.
Aussi Recep Tayyip Erdogan a-t-il joué avec le feu. L'EI étant, en Syrie, le meilleur ennemi des Kurdes, Ankara n'entendait pas affaiblir les djihadistes qui combattaient aussi Daesh. Pire, la Turquie a laissé passer les volontaires étrangers qui rejoignaient les rangs de l'EI, a acheté son pétrole et lui a, semble-t-il, même fourni des armes, début 2014. Parallèlement, Erdogan a fermé la frontière devant les jeunes volontaires kurdes de Turquie qui voulaient se porter au secours de Kobané, la ville kurde de Syrie assiégée pendant 4 longs mois. Kobané sera finalement libérée par les Kurdes, après de terribles combats contre l'EI.
3 000 sympathisants dans des cellules dormantes de l'EI
Aussi, les Kurdes du PKK viennent-ils de se venger. Accusant les autorités d'être responsables, par leur double jeu, de l'attentat contre les jeunes Kurdes à Suruç, le PKK a assassiné, en deux endroits différents, trois policiers accusés de collaboration avec l'EI. En réponse, Ankara a entrepris, le 24 juillet à l'aube, une grande rafle (251 arrestations) dans les milieux Kurdes pro-PKK et parmi les djihadistes supposés, à travers tout le pays.
La situation risque d'être plus en plus critique pour la Turquie. Erdogan vient en effet de décider de se battre sur deux fronts. Le premier : en déclarant de fait la guerre à l'EI, la Turquie devrait s'impliquer de plus en plus dans la coalition internationale. Mais elle craint les représailles sur son sol où, selon des chiffres récents des services secrets turcs, l'EI disposerait de 3 000 sympathisants dans des cellules dormantes.
Second front : le PKK. Les négociations engagées en 2012 pour mettre fin au long conflit qui oppose Ankara au parti autonomiste, et a fait 40 000 morts depuis les années 1980, risquent d'être remises en cause. Certes, une partie non négligeable des Kurdes de Turquie, en particulier l'aile politique du PKK, qui envoie des députés au Parlement, tente de calmer le jeu. La majorité des Kurdes veut la paix. Il existe cependant une autre crainte à Ankara : que les Kurdes et les djihadistes règlent leurs comptes en Turquie même..
Par Mireille Duteil
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